Locataire sans bail qui ne paie plus : quelles actions ?
La situation d’un locataire sans bail écrit est bien plus fréquente qu’on ne le croit en pratique. Elle survient lorsque, par facilité, confiance ou urgence, un propriétaire laisse un occupant s’installer dans son logement sans formaliser de contrat écrit.
Tant que les loyers sont réglés, cette situation peut sembler sans conséquence. Mais dès que surviennent des impayés ou un refus de quitter les lieux, l’absence de bail écrit devient une source de blocage et de contentieux lourd.
Contrairement à une idée reçue, l’absence d’écrit ne prive pas le bailleur de ses droits. Le Code civil (article 1714) et la loi du 6 juillet 1989 reconnaissent pleinement la validité du bail verbal, qui produit les mêmes effets qu’un bail écrit : le locataire est tenu de payer ses loyers et charges, et le propriétaire reste tenu de délivrer un logement décent et d’en garantir la jouissance paisible.
Cette reconnaissance du bail verbal a été confirmée par une jurisprudence constante, la Cour de cassation rappelant à plusieurs reprises que la preuve de l’existence du contrat peut résulter de simples éléments factuels, tels que la remise des clés, les quittances de loyer ou même les témoignages (Cass. 3e civ., 13 janvier 1999).
Pour les propriétaires, plusieurs questions cruciales se posent alors :
- Comment recouvrer les loyers impayés sans disposer d’un bail écrit ?
- Quelles démarches permettent d’obtenir l’expulsion du locataire en cas de refus de libérer les lieux ?
- Quels sont les risques juridiques, fiscaux et financiers liés à une location informelle (qualification de bail au noir, redressements, responsabilité civile) ?
Cet article a pour objectif de fournir une analyse juridique approfondie et des solutions pratiques afin d’accompagner les bailleurs dans la gestion de ces situations. Il s’adresse autant aux propriétaires particuliers qu’aux investisseurs immobiliers et bailleurs institutionnels confrontés à des occupants sans bail.
En tant que cabinet d’avocats spécialisé en droit immobilier, nous y exposons :
- le cadre légal applicable à la location sans bail écrit,
- les voies de recours pour recouvrer les loyers et obtenir la restitution du bien,
- ainsi que les stratégies de prévention pour sécuriser à l’avenir toute relation locative.
Sommaire :
- I. Situation typique et problèmes rencontrés
- II. Conséquences juridiques de l’absence de bail écrit
- III. Procédures de recouvrement des loyers impayés
- IV. Procédure d’expulsion du locataire sans bail
- V. Conseils pour sécuriser les relations locatives à l’avenir
- VI. Enjeux commerciaux pour les propriétaires
- VII. Conclusion
- VIII. Questions fréquentes sur la location sans bail
I. Situation typique et problèmes rencontrés
Il n’est pas rare qu’un propriétaire, par confiance, par précipitation ou par manque d’information, laisse un occupant prendre possession de son logement sans qu’aucun bail écrit ne soit signé. La relation repose alors sur un simple accord oral, qui fonctionne tant que les paiements sont effectués régulièrement.
Mais dès lors que le locataire cesse de régler ses loyers ou manifeste une volonté de se maintenir dans les lieux sans respecter ses obligations, le propriétaire se retrouve confronté à un double écueil :
- Recouvrer les sommes impayées (loyers et charges) dans un contexte où il n’existe pas de contrat écrit matérialisant les engagements des parties ;
- Obtenir la restitution du logement lorsque l’occupant refuse de quitter les lieux, ce qui peut nécessiter une procédure d’expulsion.
1. Une difficulté probatoire accrue
En l’absence d’écrit, le propriétaire doit démontrer l’existence d’une relation locative. Cette preuve peut être rapportée par tout moyen (article 1714 du Code civil), par exemple :
- relevés bancaires attestant des virements mensuels du locataire,
- échanges de courriels ou de SMS évoquant le paiement du loyer,
- quittances délivrées par le bailleur, même de manière informelle,
- témoignages du voisinage ou du syndic sur l’occupation régulière des lieux.
Ainsi, l’absence de contrat écrit n’exclut pas la reconnaissance d’un bail verbal, mais rend la constitution du dossier plus technique et parfois plus contestable.
2. Des procédures judiciaires plus longues et incertaines
L’absence de bail écrit peut avoir plusieurs conséquences pratiques :
- Les procédures de recouvrement sont souvent ralenties car le juge vérifie attentivement la réalité du contrat de location.
- L’expulsion d’un occupant sans bail ne peut pas être engagée directement comme pour un squatteur : le juge doit d’abord constater l’existence d’un bail verbal, puis prononcer sa résiliation.
- Le risque de contestation par le locataire est accru : certains occupants n’hésitent pas à prétendre être hébergés gratuitement ou à nier l’existence d’un accord locatif.
3. Une situation à haut risque pour le propriétaire
Au-delà des retards de procédure, le bailleur encourt plusieurs risques :
- Perte financière prolongée liée aux loyers impayés et aux frais de procédure.
- Blocage du bien qui ne peut pas être reloué, alors qu’il constitue souvent une source de revenu nécessaire (ex. : remboursement d’un prêt immobilier).
- Responsabilité fiscale en cas de location non déclarée assimilée à un “bail au noir”.
- Risque de contentieux multiples si le locataire conteste la procédure d’expulsion ou réclame la reconnaissance de droits supplémentaires.
En pratique, la situation du locataire sans bail écrit place le propriétaire dans une position fragile : il dispose bien de droits, mais ceux-ci exigent des démarches plus lourdes et juridiquement encadrées pour être exercés.
II. Conséquences juridiques de l’absence de bail écrit
Contrairement à une idée répandue, l’absence de contrat écrit ne rend pas la location inexistante ou irrégulière sur le plan juridique. En droit français, le bail peut parfaitement exister sous une forme verbale, produisant les mêmes effets qu’un bail écrit. La principale difficulté pour le propriétaire n’est donc pas la validité du contrat, mais la preuve de son existence et de son contenu.
1. Présomption de bail verbal
L’article 1714 du Code civil dispose expressément que : « On peut louer par écrit ou verbalement ». Ainsi, le bail verbal est un contrat tout à fait valable, reconnu tant par la doctrine que par la jurisprudence.
La Cour de cassation a rappelé à plusieurs reprises que la remise des clés, l’occupation des lieux et le versement d’un loyer suffisent à établir l’existence d’un bail verbal (Cass. 3e civ., 13 janvier 1999, n° 97-19.576 ; Cass. 3e civ., 9 juin 2010, n° 09-14.055).
Conséquence pratique : même en l’absence de contrat écrit, un juge pourra qualifier la situation de bail verbal si des indices concordants démontrent l’existence d’un accord locatif.
2. Droits et obligations des parties
Le bail verbal entraîne les mêmes obligations réciproques que le bail écrit, dès lors que le logement relève de la loi du 6 juillet 1989 sur les baux d’habitation.
a) Obligations du locataire
- Paiement du loyer et des charges (article 7, loi du 6 juillet 1989).
- Entretien courant du logement et réparations locatives (article 7, b).
- Usage paisible des lieux, sans causer de troubles de voisinage.
- Assurance habitation obligatoire, même sans bail écrit.
b) Obligations du bailleur
- Délivrer un logement décent conforme aux normes d’habitabilité (article 6, loi de 1989).
- Assurer la jouissance paisible du locataire, en le protégeant contre les troubles.
- Entretenir le logement et réaliser les réparations nécessaires autres que locatives.
- Remettre des quittances de loyer sur demande du locataire.
Ainsi, l’absence de bail écrit n’exonère ni l’une ni l’autre des parties de leurs obligations légales et contractuelles.
3. Les limites pratiques de l’absence d’écrit
Même si le bail verbal est valide, son absence de formalisme crée des difficultés :
- Impossible de prouver aisément le montant exact du loyer convenu, faute de clause écrite.
- Absence de clause résolutoire, ce qui rallonge les délais d’expulsion en cas d’impayés.
- Difficulté à établir la durée convenue du bail : le juge applique par défaut les règles de la loi de 1989 (bail de 3 ans minimum pour un bailleur personne physique).
- Risques de requalification fiscale si la location n’est pas déclarée.
En résumé :
Le bail verbal est un contrat à part entière, juridiquement opposable, mais qui génère une insécurité probatoire et pratique pour le propriétaire. S’il offre une base légale pour agir en justice, il complique toutefois la démonstration des droits du bailleur et allonge les délais de résolution des litiges.
III. Procédures de recouvrement des loyers impayés
En présence d’un locataire sans bail écrit mais débiteur de loyers, le propriétaire dispose de plusieurs leviers juridiques pour obtenir le règlement des sommes dues. Le bail verbal étant reconnu par la loi et la jurisprudence, il constitue une base légale suffisante pour engager une action. Toutefois, la stratégie doit être menée avec rigueur afin de maximiser les chances de succès et limiter les délais.
1. Mise en demeure : la phase amiable obligatoire
La première étape consiste à adresser au locataire une mise en demeure de payer.
- Celle-ci doit être envoyée en lettre recommandée avec accusé de réception ou par exploit d’huissier.
- Elle doit mentionner :
- l’identité des parties et l’adresse du logement,
- le détail des sommes impayées (loyers, charges, pénalités éventuelles),
- un délai précis de régularisation (souvent 8 ou 15 jours),
- les conséquences d’un défaut de paiement (saisine du juge, demande d’expulsion).
Même en l’absence de bail écrit, cette mise en demeure est essentielle pour démontrer la bonne foi du bailleur et préparer un dossier solide. Elle permet aussi parfois d’obtenir un règlement amiable et d’éviter la voie judiciaire.
2. Saisine du juge : l’action en recouvrement
En cas de non-paiement persistant, le bailleur peut saisir le tribunal judiciaire du lieu de situation de l’immeuble.
Deux voies principales s’offrent à lui :
a) La procédure d’injonction de payer
- Elle est rapide et peu coûteuse.
- Elle repose sur des preuves écrites : relevés bancaires, quittances, correspondances, voire attestations de voisinage.
- Le juge rend une ordonnance d’injonction de payer, qui devient exécutoire si le locataire ne forme pas opposition dans un délai d’un mois.
b) L’assignation au fond
- Recommandée si la dette est élevée ou contestée.
- Permet de demander à la fois le paiement des loyers et la résiliation du bail verbal.
- L’affaire est examinée de manière contradictoire, avec possibilité pour le juge d’accorder des délais de paiement (article 1343-5 du Code civil).
Dans les deux cas, l’absence d’écrit n’empêche pas la reconnaissance du bail, dès lors que des éléments de preuve concordants établissent la réalité de la relation locative.
3. Prescription des loyers impayés
L’article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989 fixe la prescription des loyers à trois ans.
- Le bailleur ne peut réclamer que les loyers dus sur les trois années précédant sa demande en justice.
- Les loyers antérieurs sont prescrits, sauf en cas d’interruption (mise en demeure, commandement de payer).
Exemple pratique : si un locataire n’a pas payé depuis janvier 2020 et que le bailleur agit en janvier 2025, seuls les loyers à partir de janvier 2022 pourront être réclamés.
4. Stratégies pratiques pour le bailleur
- Conserver toutes les preuves de paiement (virements, reçus, messages). Même informelles, elles permettent d’établir la réalité d’un bail verbal.
- Multiplier les démarches amiables (courriers, relances, constats d’huissier) afin de constituer un dossier complet.
- Agir rapidement : plus l’action est engagée tôt, plus le bailleur maximise ses chances de recouvrer une partie des loyers et de limiter la prescription.
En résumé :
Le bail verbal, bien que non écrit, permet d’engager pleinement la responsabilité du locataire débiteur. Les procédures de recouvrement restent accessibles et efficaces si le propriétaire adopte une stratégie probatoire rigoureuse et agit dans les délais.
IV. Procédure d’expulsion du locataire sans bail
L’absence de contrat écrit ne prive pas le bailleur du droit de récupérer son bien. En revanche, elle n’autorise pas une reprise unilatérale : l’expulsion demeure une procédure judiciaire encadrée. En pratique, le juge doit constater la résiliation du bail verbal ou qualifier l’occupation de “sans droit ni titre” avant de prononcer l’expulsion.
L’article L. 411-1 du Code des procédures civiles d’exécution est clair : « Nul ne peut être contraint de quitter les lieux qu’il habite sans un titre exécutoire et une procédure régulière ».
1. La saisine du juge
Le bailleur doit assigner le locataire devant le tribunal judiciaire du lieu de situation du logement.
Deux options :
- Action au fond : pour obtenir à la fois la résiliation du bail verbal et l’expulsion.
- Référé-expulsion : procédure d’urgence lorsqu’il n’y a pas de contestation sérieuse (par exemple si le locataire reconnaît l’impayé mais refuse de partir).
Le juge vérifie :
- la réalité de la relation locative (bail verbal),
- le manquement du locataire à ses obligations (impayés, occupation irrégulière),
- la proportionnalité de la mesure (respect du droit au logement protégé par la CEDH).
Si ces conditions sont réunies, il prononce la résiliation du bail et ordonne l’expulsion.
2. Signification du jugement par huissier
Une fois le jugement rendu, le propriétaire doit le faire signifier au locataire par un commissaire de justice (ancien huissier).
- L’acte de signification rappelle la décision et fixe un délai pour libérer les lieux.
- Ce délai est en principe de 2 mois (article L. 412-1 CPCE), sauf si le juge en a décidé autrement.
- Durant ce délai, le locataire peut encore solliciter des délais de grâce supplémentaires (jusqu’à 3 ans maximum – article L. 412-3 CPCE).
Sans cette signification régulière, le jugement d’expulsion ne peut pas être exécuté.
3. Concours éventuel de la force publique
Si, à l’expiration du délai légal, le locataire refuse toujours de quitter les lieux, l’huissier peut :
- procéder à une tentative d’expulsion amiable,
- puis, en cas d’échec, solliciter le concours de la force publique auprès de la préfecture.
L’administration peut accorder ou refuser ce concours, en fonction de la situation sociale du locataire et des obligations de relogement. En cas de refus, l’État peut engager sa responsabilité et être condamné à indemniser le bailleur pour la privation de jouissance de son bien.
4. La trêve hivernale
Il convient de rappeler que la trêve hivernale (du 1er novembre au 31 mars, article L. 412-6 CPCE) s’applique même aux locataires sans bail écrit.
- Pendant cette période, aucune expulsion effective ne peut avoir lieu.
- Le jugement peut être rendu, mais son exécution matérielle est suspendue.
- Exceptions : squatteurs entrés par voie de fait, personnes occupant un logement insalubre ou menaçant ruine.
5. Exemple pratique
Un propriétaire découvre que son locataire, entré sans bail écrit, n’a pas payé de loyers depuis 8 mois. Après mise en demeure restée sans réponse :
- Il assigne le locataire devant le tribunal judiciaire.
- Le juge reconnaît l’existence d’un bail verbal, prononce la résiliation et ordonne l’expulsion.
- L’huissier signifie le jugement et fixe un délai de 2 mois.
- Faute de départ volontaire, il sollicite le concours de la force publique.
En résumé :
Même sans bail écrit, l’expulsion reste possible mais uniquement via un jugement et une exécution forcée encadrée. Tout propriétaire qui reprendrait les lieux de manière unilatérale (changement de serrure, intrusion) s’exposerait à de lourdes sanctions pénales et civiles.
V. Conseils pour sécuriser les relations locatives à l’avenir
L’expérience démontre que les difficultés liées à l’absence de bail écrit sont souvent plus coûteuses et chronophages que leur prévention. Pour éviter de se retrouver dans une situation fragile face à un locataire défaillant, plusieurs bonnes pratiques s’imposent aux bailleurs.
1. Formaliser systématiquement un bail écrit
Même si le bail verbal est juridiquement valable, un contrat écrit conforme à la loi du 6 juillet 1989 demeure indispensable.
- Il fixe clairement les droits et obligations des parties (montant du loyer, répartition des charges, durée du bail).
- Il prévoit des clauses protectrices, notamment la clause résolutoire qui permet une résiliation de plein droit en cas d’impayés après commandement.
- Il constitue une preuve incontestable en cas de litige.
En pratique, un bail écrit réduit considérablement les délais d’action du bailleur en cas de défaut de paiement.
2. Vérifier la solvabilité du locataire
Avant toute entrée dans les lieux, il est essentiel de contrôler la situation financière du locataire :
- bulletins de salaire récents,
- dernier avis d’imposition,
- contrat de travail ou attestation d’employeur,
- justificatif d’identité et de domicile précédent.
Une négligence à ce stade peut se traduire par des impayés difficiles à recouvrer.
3. Exiger une garantie locative
Plusieurs mécanismes peuvent sécuriser le paiement des loyers :
- Caution solidaire : un tiers (parent, proche) s’engage à régler les loyers en cas de défaillance du locataire.
- Garantie Visale (Action Logement) : dispositif gratuit qui couvre jusqu’à 36 mois de loyers impayés.
- Dépôt de garantie : limité à 1 mois de loyer hors charges pour un logement nu (2 mois pour un meublé).
Ces garanties sont particulièrement utiles lorsqu’il s’agit d’un locataire sans historique locatif.
4. Encadrer les paiements
- Privilégier les paiements par virement bancaire pour conserver une preuve claire.
- Remettre systématiquement des quittances de loyer, même si elles sont établies sous forme numérique.
- Mettre en place un prélèvement automatique lorsque c’est possible.
5. Prévoir un suivi juridique régulier
Les bailleurs particuliers sous-estiment souvent la nécessité d’un suivi juridique.
- Faire appel à un avocat spécialisé en droit immobilier permet d’anticiper les litiges et de réagir rapidement en cas d’impayés.
- Le cabinet peut également rédiger un modèle de bail conforme aux dernières évolutions législatives (loi ALUR, loi ELAN, réforme ZAN, etc.).
En résumé :
La sécurisation de la relation locative repose sur la prévention. Un bail écrit, des garanties solides et un accompagnement juridique professionnel permettent d’éviter la majorité des contentieux et de protéger efficacement les intérêts du bailleur.
VI. Enjeux commerciaux pour les propriétaires
Au-delà des aspects strictement juridiques, la présence d’un locataire sans bail écrit et en situation d’impayés constitue un risque économique majeur pour le bailleur. L’impact se mesure tant en termes de pertes immédiates qu’en termes de valorisation patrimoniale du bien.
1. Pertes de revenus liées aux loyers impayés
Chaque mois d’impayé représente une perte sèche pour le propriétaire.
- Exemple : pour un loyer de 1 200 € mensuels, 6 mois d’impayés = 7 200 € de perte.
- Si le logement est financé par un crédit immobilier, le bailleur continue de rembourser ses mensualités sans percevoir les loyers attendus, ce qui peut fragiliser son équilibre financier.
- Les charges de copropriété, la taxe foncière et les assurances restent dues, aggravant la charge nette pour le propriétaire.
2. Coûts des procédures judiciaires
Engager une procédure d’expulsion ou de recouvrement des loyers engendre des frais non négligeables :
- honoraires d’avocat et d’huissier,
- frais de signification et d’exécution forcée,
- frais de justice (même si une partie peut être mise à la charge du locataire, encore faut-il qu’il soit solvable).
Ces coûts peuvent facilement représenter plusieurs milliers d’euros, surtout si la procédure s’éternise.
3. Risque de dégradation du logement
Un locataire en situation conflictuelle peut négliger l’entretien du bien, voire commettre des dégradations volontaires.
- Absence de chauffage ou d’aération → humidité, moisissures.
- Dégradations volontaires lors du départ (portes, vitres, équipements).
- Abandon d’encombrants ou de déchets, générant des frais de remise en état.
Ces dégradations nécessitent souvent des réparations lourdes avant de pouvoir relouer le bien, ce qui allonge encore la période sans revenus.
4. Difficulté à relouer en cas d’occupation prolongée
Tant que le locataire sans bail occupe les lieux, le logement est indisponible à la relocation.
- Le propriétaire perd en attractivité sur le marché locatif, surtout dans les zones tendues.
- La valeur du bien peut même être affectée en cas de procédure d’expulsion longue (certains investisseurs hésitent à acquérir un bien occupé par un locataire défaillant).
- Le blocage peut durer de nombreux mois, voire plus d’un an si la trêve hivernale retarde l’exécution.
5. L’importance d’un accompagnement juridique réactif
Un accompagnement juridique spécialisé permet de réduire ces risques en agissant rapidement et efficacement :
- analyse de la situation et qualification juridique de l’occupation (bail verbal, occupation sans droit ni titre),
- mise en place immédiate d’une stratégie de recouvrement et/ou d’expulsion,
- sécurisation de la procédure pour éviter tout vice susceptible d’allonger les délais,
- conseil en prévention (clauses contractuelles, garanties locatives, fiscalité).
En résumé :
La problématique du locataire sans bail n’est pas seulement une question de droit : c’est aussi un enjeu économique qui peut peser lourdement sur la rentabilité locative et la valeur patrimoniale du bien. Plus l’action du bailleur est tardive, plus le coût global augmente. Un accompagnement par un avocat spécialisé en droit immobilier permet non seulement de limiter les pertes financières, mais aussi de préserver la valeur du patrimoine.
Conclusion
Même en l’absence de bail écrit, le propriétaire n’est pas sans recours. Le droit français reconnaît pleinement la validité du bail verbal (article 1714 du Code civil), qui entraîne pour le locataire l’obligation de régler son loyer et pour le bailleur celle d’assurer la jouissance paisible et décente du logement. Ainsi, les juges admettent régulièrement l’existence d’une relation locative fondée sur des éléments matériels (remise des clés, paiements antérieurs, quittances ou témoignages).
En cas de loyers impayés, le propriétaire peut donc :
- engager une procédure de recouvrement afin d’obtenir une condamnation du locataire au paiement des sommes dues,
- solliciter devant le tribunal judiciaire la résiliation du bail verbal et l’expulsion de l’occupant, dans le respect strict des dispositions du Code des procédures civiles d’exécution.
Toutefois, si ces recours existent, ils demeurent longs, coûteux et incertains, notamment en raison des aléas probatoires et de l’allongement des délais judiciaires.
C’est pourquoi la prévention reste la meilleure stratégie. Formaliser un bail écrit dès l’origine permet de :
- clarifier les obligations des parties (loyer, charges, durée, entretien),
- insérer des clauses protectrices comme la clause résolutoire,
- sécuriser les preuves en cas de contentieux,
- accélérer la procédure en cas d’impayés ou de manquements du locataire.
En tant que cabinet d’avocats spécialisé en droit immobilier, nous recommandons aux bailleurs d’adopter une approche proactive :
- Sécuriser juridiquement les contrats dès la mise en location.
- Contrôler la solvabilité des candidats locataires.
- Anticiper les risques d’impayés grâce à des garanties solides (caution, assurance loyers impayés, garantie Visale).
- Réagir immédiatement en cas de défaut de paiement par une mise en demeure.
- S’entourer d’un conseil juridique afin de défendre efficacement ses intérêts en cas de litige.
En résumé :
La loi offre au propriétaire des moyens d’action même face à un locataire sans bail écrit. Mais seul un cadre contractuel clair et sécurisé – un bail écrit, complet et conforme – garantit une protection optimale. En pratique, c’est la clé pour préserver la rentabilité de l’investissement locatif et éviter des procédures longues et coûteuses.
Questions fréquentes sur la location sans bail
1. L’absence de bail écrit protège-t-elle le locataire ?
Non. Contrairement à une idée reçue, l’absence d’écrit ne prive pas le bailleur de ses droits. Le bail verbal, reconnu par l’article 1714 du Code civil, produit les mêmes effets qu’un bail écrit.
- Le locataire doit continuer à payer son loyer et ses charges (article 7 de la loi du 6 juillet 1989).
- Il reste tenu de respecter l’usage paisible des lieux et d’assumer les réparations locatives.
- Le bailleur, de son côté, conserve ses obligations : délivrer un logement décent, assurer l’entretien et garantir la jouissance paisible.
En pratique, l’absence de bail écrit ne protège pas le locataire, mais elle fragilise la preuve en cas de litige. C’est donc une source d’insécurité pour les deux parties.
2. Comment expulser un locataire sans bail ?
L’expulsion ne peut jamais être décidée unilatéralement par le propriétaire (changer les serrures, couper l’électricité, etc.). Une telle reprise serait assimilée à une violation de domicile (article 226-4 du Code pénal) et exposerait le bailleur à un an de prison et 15 000 € d’amende.
La procédure légale est la même que pour un bail écrit :
- Saisine du tribunal judiciaire pour obtenir un jugement de résiliation du bail verbal et d’expulsion.
- Signification du jugement par huissier au locataire, avec délai légal de deux mois (sauf exceptions).
- Exécution forcée par un huissier, avec possibilité de concours de la force publique en cas de refus de départ.
La trêve hivernale (1er novembre – 31 mars) s’applique également aux locataires sans bail écrit.
3. Peut-on réclamer les loyers impayés rétroactivement ?
Oui, mais dans une limite stricte : le bailleur peut réclamer les loyers impayés dans le délai de prescription de trois ans, prévu par l’article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989.
- Exemple : en janvier 2025, le bailleur peut encore réclamer des loyers dus depuis janvier 2022. Les loyers antérieurs seraient prescrits.
- Cette prescription peut toutefois être interrompue par une mise en demeure, un commandement de payer ou une action en justice, ce qui prolonge le délai.
Conseil pratique : agir rapidement en cas d’impayés afin de limiter la perte financière liée à la prescription.


