Expropriation et indemnisation : Décryptage complet de la procédure
Lorsqu’elle justifie d’un intérêt public, l’Etat ou une collectivité territoriale peut requérir d’un particulier ou d’une entreprise que celle-ci lui cède la propriété de son bien.
Cet acte de cession correspond à ce qu’on appelle communément, expropriation.
L’expropriation est le processus par lequel une entité publique contraint un propriétaire à céder sa propriété, même si celle-ci n’est pas mise en vente. L’expropriation est régie par des règles précises qui ont pour vocation entre autres, d’encadrer la procédure d’expropriation et de protéger le propriétaire exproprié.
Sommaire :
I. Les bases juridiques de l’expropriation
Régit par un cadre légal précis, l’expropriation ne peut faire foi que si elle est justifiée par des motifs légitimes, évocables par des acteurs précis.
1- Le cadre légal et constitutionnel de l’expropriation
L’expropriation est encadrée par des textes juridiques précis. Elle repose premièrement sur l’article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, qui conditionne l’expropriation à une « nécessité publique » et une « juste indemnité ». Elle est en second lieu régie par le Code de l’Expropriation pour code d’utilité publique qui prévoit la procédure suivant laquelle elle doit être effectuée.
2- Les motifs légitimes de l’expropriation
L’article 1er du code de l’expropriation pour utilité publique, dispose que « L’expropriation, en tout ou partie, d’immeubles ou de droits réels immobiliers ne peut être prononcée qu’à la condition qu’elle réponde à une utilité publique (…) ».
Il ressort de cette disposition que l’expropriation ne peut intervenir que si elle présente une utilité publique. Les juges considèrent que cette condition est remplie dès lors que les 3 conditions suivantes sont réunies : Le projet est réellement justifié ; le projet ne peut pas être évité ; l’atteinte à la propriété de la personne expropriée n’est pas disproportionnée par rapport à l’objectif poursuivi.
De plus, les motifs légitimes pouvant justifier une expropriation seront notamment : la création de lotissements communaux, La création d’établissements d’enseignements ou hospitaliers, la réalisation de projets environnementaux (réserves naturelles, digues), les actions pour la sécurité publique (exemple : suppression de biens dangereux).
3- Les acteurs de la procédure
Les acteurs susceptibles d’intervenir dans la procédure d’expropriation sont de trois ordres :
- L’autorité expropriante : une collectivité locale, l’État ou une entreprise publique chargée du projet d’utilité publique.
- Les propriétaires concernés : particuliers, entreprises ou institutions possédant le bien visé.
- Les juridictions compétentes : souvent un juge administratif (pour l’utilité publique) et un juge judiciaire (pour les questions d’indemnisation).
II- Les étapes de la procédure d’expropriation
1- L’enquête publique : Le premier jalon
Elle est fondée sur un dossier transmis par la personne publique au préfet. Elle a pour objectif d’informer le public, recueillir des observations, et évaluer les impacts du projet. Elle est menée par un commissaire enquêteur désigné par le président du Tribunal administratif, qui rédige un rapport avec un avis favorable ou défavorable.
2- La déclaration d’utilité publique
Au vu des résultats de l’enquête du commissaire-enquêteur, si l’utilité publique du projet est identifiée, le préfet prononce une déclaration d’utilité publique (DUP qui est un acte administratif qui officialise le caractère d’utilité publique du projet).
Cet acte doit être affiché dans la mairie concernée par le projet. Le jour de l’affichage sert de point de départ aux intéressés pour contester la DUP et engager un recours auprès du tribunal administratif compétent.
3- La phase de négociation à l’amiable
Avant de recourir à la force publique, les autorités expropriantes peuvent tenter de trouver un accord avec les propriétaires du bien visé. Cette étape permet d’éviter des procédures longues et coûteuses et de négocier un accord entre les acteurs concernés. Si aucun accord n’est trouvé, on passe à la phase judiciaire.
4- Le recours à la procédure judiciaire
En l’absence d’accord, la personne publique peut saisir le juge de l’expropriation qui prononce une ordonnance d’expropriation. Cette ordonnance est notifiée à l’exproprié par lettre recommandée avec avis de réception.
L’ordonnance d’expropriation a pour effet de transférer juridiquement la propriété du bien et les droits réels immobiliers (usufruit, servitude…) de l’exproprié à la personne publique. En revanche, tant qu’il n’a pas été indemnisé par la personne publique, l’exproprié conserve la jouissance du bien.
III- L’indemnisation : Un droit fondamental pour le propriétaire
1- Les principes généraux de l’indemnisation
Relativement à l’article 1er du code de l’expropriation pour utilité publique, l’indemnisation doit être juste et préalable. Elle vise à compenser intégralement le préjudice subi par le propriétaire. Par conséquent, elle doit couvrir l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.
2- Méthode d’évaluation de l’indemnité
L’évaluation de l’indemnité inclut, la valeur vénale du bien basée sur le prix du bien sur le marché immobilier au moment de l’expropriation. Elle correspond à l’indemnité principale qui permet à l’ancien propriétaire d’acquérir un bien équivalent à celui qu’il possédait.
Les préjudices annexes peuvent également rentrer dans la détermination de l’indemnité : frais de déménagement, perte de revenus pour les professionnels, troubles divers mais également Les aménagements ou investissements réalisés sur le bien par le propriétaire. Seulement, Les éléments matériels du bien sont en revanche arrêtés à la date de l’ordonnance d’expropriation, ce qui exclut la prise en compte d’améliorations de toutes sortes depuis l’ordonnance
Enfin, d’autres indemnités accessoires peuvent être versées, par exemple en cas d’expropriation partielle du bien si la partie restante n’est pas utilisable dans des conditions normales pour son propriétaire.
3- Les cas particuliers dans l’indemnisation
Pour ce qui est des cas particuliers, on a notamment les cas de propriété partagée ou indivises : dans cette hypothèse, chaque partie doit être indemnisée proportionnellement. On pourrait également considérer les biens avec une valeur affective comme des cas particuliers. Précisément, bien que la loi se concentre sur la valeur économique, les préjudices moraux ou sociaux peuvent parfois être occasionnés par une expropriation. Dans ces cas, il appartiendra au juge d’apprécier de tels effets dans la détermination de l’indemnité dû à l’exproprié.
IV- Les Droits et recours du propriétaire face à l’expropriation
1- Contester l’utilité publique
Le propriétaire peut saisir le tribunal administratif pour remettre en cause la DUP, notamment en cas de : défaut d’intérêt public ou de vices de procédure.
2- Réclamer une réévaluation de l’indemnité
Si le montant proposé est jugé insuffisant, le propriétaire peut saisir le juge de l’expropriation pour demander une nouvelle évaluation. Le juge pourra dans ce cas faire appel à des experts pour fixer une indemnité équitable.
3- Se défendre face à des abus ou des irrégularités
Le propriétaire peut invoquer des recours si la procédure n’a pas respecté les délais légaux mais également lorsque l’autorité expropriante agit de manière abusive ou déloyale. Certains abus pourraient dans certains cas engager la responsabilité de l’autorité publique.
V. Conclusion
L’expropriation est un outil puissant pour réaliser des projets d’intérêt général, mais elle doit être utilisée avec précaution et dans le respect des droits fondamentaux. Les propriétaires disposent de garanties importantes, notamment le droit à une juste indemnisation et à des recours en cas d’abus. Il est essentiel que le processus reste transparent et équitable, car il touche à un droit fondamental qu’est le droit de la propriété privée.
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